Mala consuetudo
Le concept de coutume est une création des juristes occidentaux permettant de convertir les usages autochtones dans les termes de l’ordre juridique dominant. Si la contrainte de l’État est décisive dans la formulation de la coutume, faut-il penser qu’en Europe aussi elle fut une création étatique, les peuples ne participant guère à son épanouissement ? La mala consuetudo médiévale témoigne d’un rapport de force si bien qu’il faut restituer la pratique des usages, l’action du peuple dans la redéfinition des coutumes. L’article considère le contenu de l’expression médiévale comme une catégorie de pensée et la transpose dans l’Antiquité romaine afin de revenir sur le processus de création des consuetudines. Si la consuetudo romaine est bien une création du pouvoir, les communautés auxquelles elle s’applique parviennent aussi à contenir son périmètre. Sa pérennité tient sans doute en partie au fait qu’elle a été perçue ensuite comme un privilège communautaire.The concept of custom is a creation of Western lawyers allowing for the conversion of indigenous uses into the terms of the dominant legal order. If the State’s constraint is ultimately decisive in the formulation of custom, does that mean in Europe too it was essentially a State creation, with the peoples hardly participating in its existence? The mala consuetudo is a matter of power relations, so that it is necessary to emphasize the impact of practices, of popular action on the shaping of customs. This article considers the content of the medieval expression as a category of thought and transposes it to Roman antiquity in order to reconsider the development of consuetudines. If the Roman consuetudo was indeed a creation of power, the communities to which it applied managed to contain its perimeter. Its durability is probably due in part to the fact that it was perceived as a community privilege.