La kétamine bloque de façon non compétitive les récepteurs canaux N-méthyl-D-aspartate (NMDA). Elle induit une anesthésie particulière, dite dissociative, en activant le système limbique, mais en déconnectant les voies thalamonéocorticales, notamment les aires associatives. La molécule comporte un carbone asymétrique qui explique l’existence de deux énantiomères. L’isomère S(+) ou eskétamine, qui dévie la lumière à droite, bloque trois à quatre fois plus le récepteur NMDA que l’isomère R(-). Il vient d’obtenir une AMM en France et y possède une autorisation temporaire d’utilisation dans l’indication de la dépression réfractaire. La demi-vie de distribution de la kétamine, dix minutes, permet un réveil rapide. La demi-vie d’élimination est de deux à trois heures. Elle est métabolisée au niveau du cytochrome P450 hépatique. La norkétamine est un métabolite actif qui possède 20 à 30 % de l’effet analgésique de la molécule mère et qui explique l’efficacité de l’administration orale. La kétamine exerce peu d’effets dépresseurs cardiorespiratoires. La préservation de la pression artérielle et du débit cardiaque est aussi efficace qu’avec l’étomidate. Elle possède un effet bronchodilatateur et préserve l’oxygénation en maintenant la ventilation spontanée (VS) et la capacité résiduelle fonctionnelle. Une titration prudente en commençant par de très faibles doses (bolus de 2 à 5 mg), augmentées progressivement, permet la sédation en VS, associée au propofol ou au midazolam. Ses effets neurologiques ont été complètement réévalués depuis une quinzaine d’années, et elle n’a plus de raison d’être contre-indiquée chez le cérébrolésé. Ses propriétés analgésiques et antihyperalgésiques sont depuis une vingtaine d’années au centre de son utilisation périopératoire dans le cadre d’une stratégie d’analgésie préventive multimodale, voire du nouveau concept d’OFA (opioid free anesthesia) et dans le traitement de la douleur. Au blocage des récepteurs NMDA qui explique les propriétés antihyperalgésiques, dont l’opposition à l’hyperalgésie induite par les opioïdes, s’ajoutent l’activation des voies monoaminergiques descendantes, un blocage des canaux sodiques, des propriétés antipro-inflammatoires pléiotropes. Il semble qu’une relation dose-effet implique de maintenir une concentration plasmatique efficace (supérieure à 100 ng/ml) par une perfusion continue. Elle est particulièrement indiquée et efficace en cas de douleurs importantes qui ouvrent les canaux NMDA et chez les patients addicts aux opioïdes (use-dependence).